Hölderlin – Timidité (Blödigkeit)

Ne connais-tu pas des vivants en foule ?
Ton pied ne foule-t-il pas la vérité comme un tapis ?
Donc, mon génie, avance-toi
nu dans la vie, et ne crains rien !

Sache accueillir tout ce qui t’adviendra !
Sois toujours prêt à la joie ! D’où pourrait te venir l’affront,

ô cœur ? Que peut-il t’advenir
au terme où tu dois marcher ?

Car depuis les temps où la poésie
enseigna le recueillement à des hommes divins, race solitaire,
et aux dieux eux-mêmes, et aux chœurs des princes,
à chacun selon son origine,

nous, langues des peuples, nous avons toujours aimé
à nous mêler aux vivants,
à la foule amicale — heureux, amis de tous, ouverts à tous ;
tel notre Père, le dieu du ciel,

accorde aux riches et au pauvres le jour pensif,
et au tournant des âges nous redresse, quand nous allions nous assoupir,
nous conduisant par ses lisières d’or
comme on guide les pas des enfants.

Nous sommes habiles aussi et experts à certaines tâches
quand, par notre art, nous entraînons quelque Immortel à nous suivre.
Quant à nous, ce que nous apportons,
ce sont nos mains exercées.

BLÖDIGKEIT

Sind denn dir nicht bekannt viele Lebendigen ?
Geht auf Wahrem dein Fuß nicht, wie auf Teppichen ?
Drum, mein Genius ! tritt nur
Bar ins Leben, und sorge nicht !

Was qeschiehet, es sei alles gelegen dir, !
Sei zur Freude gereimt, oder was könnte denn
Dich beleidigen, Herz, was
Da begegnen, wohin du sollst ?

Denn, seit Himmlischen gleich Menschen, ein einsam Wild,
Und die Himmlischen selbst fürhret, der Einkehr zu,
Der Gesang, und der Fürsten
Chor, nach Arten, so waren auch

Wir, die Zungen des Volks, gerne bei Lebenden,
Wo sich vieles gesellt, freudig, und jedem gleich,
Jedem offen, so ist ja
Unser Vater, des Himmels Gott,

Der den denkenden Tag Armen und Reichen gönnt,
Der, zur Wende der Zeit, uns die Entschlafenden,
Aufgerichtet an goldnen
Gängelbanden, wie Kinder, hällt.

Gut auch sind und geschickt einem zu etwas wir,
Wenn wir kommen, mit Kunst, und von den Himmlischen
Einen bringen. Doch selber
Bringen schickliche Hände wir.

Hölderlin, Poèmes Gedichte
Aubier, collection bilingue
1943 (1986)


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